lundi 27 juillet 2020
dimanche 26 juillet 2020
Quand les rats remplacent des soldats
L'historien grec Hérodote raconte une anecdote légendaire à propos de rats en Egypte Antique.
Selon la légende, le roi d'Egypte Séthon, également prêtre d'Héphaïstos, traita mal les soldats quand il accéda au trône (il leur retira leurs terres). Quand il fut attaqué par un roi voisin, les soldats refusèrent de le défendre.
Désespéré, Séthon pria Héphaïstos de lui venir en aide :
Au milieu de ses lamentations, le sommeil le prit et il crut voir en songe le dieu, debout près de lui, l'encourager et lui promettre qu'il ne lui arriverait aucun mal s'il marchait contre l'armée des Arabes. Il lui enverrait lui-même des défenseurs. Confiant en ce songe et accompagné des Égyptiens qui voulurent bien le suivre, Séthon établit son camp à Péluse, qui est la porte de l'Égypte ; aucun des guerriers ne se joignit à lui, mais seulement des commerçants, des artisans et des boutiquiers.
Quand les ennemis arrivèrent devant Péluse, les rats des champ envahirent leur camp pendant la nuit et rongèrent leurs carquois, leurs arcs, et même les courroies de leurs boucliers, si bien que le lendemain, dépouillés de leurs armes, ils durent prendre la fuite et périrent en grand nombre.
Aujourd'hui encore on voit dans le temple d'Héphaistos une statue en pierre de ce roi, qui porte un rat sur la main ; une inscription lui fait dire : "Regardez-moi, et soyez pieux" "
Selon la légende, le roi d'Egypte Séthon, également prêtre d'Héphaïstos, traita mal les soldats quand il accéda au trône (il leur retira leurs terres). Quand il fut attaqué par un roi voisin, les soldats refusèrent de le défendre.
Désespéré, Séthon pria Héphaïstos de lui venir en aide :
Au milieu de ses lamentations, le sommeil le prit et il crut voir en songe le dieu, debout près de lui, l'encourager et lui promettre qu'il ne lui arriverait aucun mal s'il marchait contre l'armée des Arabes. Il lui enverrait lui-même des défenseurs. Confiant en ce songe et accompagné des Égyptiens qui voulurent bien le suivre, Séthon établit son camp à Péluse, qui est la porte de l'Égypte ; aucun des guerriers ne se joignit à lui, mais seulement des commerçants, des artisans et des boutiquiers.
Quand les ennemis arrivèrent devant Péluse, les rats des champ envahirent leur camp pendant la nuit et rongèrent leurs carquois, leurs arcs, et même les courroies de leurs boucliers, si bien que le lendemain, dépouillés de leurs armes, ils durent prendre la fuite et périrent en grand nombre.
Aujourd'hui encore on voit dans le temple d'Héphaistos une statue en pierre de ce roi, qui porte un rat sur la main ; une inscription lui fait dire : "Regardez-moi, et soyez pieux" "
source |
samedi 25 juillet 2020
Naissance de la souris en Egypte
Je vous ai déjà parlé de plusieurs légendes à propos de la naissance de la souris, notamment en rapport avec l'Arche de Noé.
Dans l'Egypte Antique, on rapporte une toute autre histoire : la souris naîtrait de la boue sur les rives du Nil.
Cette croyance est notamment racontée par Diodore de Sicile, un historien grec qui visite l'Egypte au Ier siècle av.J-C.
Elle nous est transmise par Jacques André Naigeons au XVIIIème siècle :
"Au temps de Diodore, [on] enseignait que le limon des marais avait produit l'homme et les animaux tout organisés [...] que pour pour preuve d'une telle formation des animaux, on voyait tous les jours en Thébaïde [région antique de la Haute-Egypte] des souris à demi-formées, n'ayant que la moitié du corps d'un animal, et le reste de pur limon."
Et Mathieu Christophe, dans ses Lettres Athéniennes (XVIIIème siècle), rapporte également :
Pour les Egyptiens, "les souris naissent, disent-ils, dans le limon du Nil. Ils prétendent qu'elles sortent de la terre, les unes entièrement, les autres seulement à demi-formées, et attachées encore au sol qui les produit".
Dans tous les cas, cet exemple des souris qui naissent de la boue, et que l'on peut voir en cours de formation, est censé corroborer le fait que toute chose vivante est née en Egypte, et s'est formée à partir de la glèbe (le choix du Nil n'est sûrement pas un hasard puisque ce fleuve assure la fertilité et l'irrigation de l'Egypte).
Dans l'Egypte Antique, on rapporte une toute autre histoire : la souris naîtrait de la boue sur les rives du Nil.
Cette croyance est notamment racontée par Diodore de Sicile, un historien grec qui visite l'Egypte au Ier siècle av.J-C.
Elle nous est transmise par Jacques André Naigeons au XVIIIème siècle :
"Au temps de Diodore, [on] enseignait que le limon des marais avait produit l'homme et les animaux tout organisés [...] que pour pour preuve d'une telle formation des animaux, on voyait tous les jours en Thébaïde [région antique de la Haute-Egypte] des souris à demi-formées, n'ayant que la moitié du corps d'un animal, et le reste de pur limon."
Et Mathieu Christophe, dans ses Lettres Athéniennes (XVIIIème siècle), rapporte également :
Pour les Egyptiens, "les souris naissent, disent-ils, dans le limon du Nil. Ils prétendent qu'elles sortent de la terre, les unes entièrement, les autres seulement à demi-formées, et attachées encore au sol qui les produit".
scène représentée sur le tombeau de Menna (Thèbes, 15e siècle av. J-C.) En bas à droite, on voit un rat dans les roseaux |
Dans tous les cas, cet exemple des souris qui naissent de la boue, et que l'on peut voir en cours de formation, est censé corroborer le fait que toute chose vivante est née en Egypte, et s'est formée à partir de la glèbe (le choix du Nil n'est sûrement pas un hasard puisque ce fleuve assure la fertilité et l'irrigation de l'Egypte).
illustration de Fanny Liem |
vendredi 24 juillet 2020
Les souris dans l'Egypte Antique
Dans l'Egypte Antique (IVème - Ier siècle av.J.C), la souris était donc déjà bien connu par les humains.
On a retrouvé, dans un tombeau, des souris momifiées, aux côtés notamment de faucon.
Pourquoi avoir placé des souris embaumés dans un tombeau ? La finalité reste un peu incertaine... On momifiait en principe les animaux de compagnie du défunt, ou bien on plaçait dans sa tombe des objets qui lui seraient utiles dans l'au-delà.
La famille enterrée là pratiquait-elle l'élevage de souris (!) ?
Ou ces souris étaient-elles destinées à nourrir les faucons embaumées à leur côté ?
Elles étaient peut-être aussi vues comme des animaux psychopompes, destinés à porter l'âme des défunts vers l'au-delà...
Par ailleurs, en Egypte, la graisse de souris était utilisée en médecine et les souris pouvaient être ingérées lors d'un rituel sacré, destiné à guérir les femmes et les enfants de problèmes salivaires.
Etant donné que, dans ce tombeau, on a retrouvé le corps d'un enfant de 12 ans, peut-être ces souris devaient-elles lui permettre de se prémunir contre des problèmes de salivations dans le royaume des morts ?
Enfin, on trouvait en Egypte (et toujours aujourd'hui dans le delta du Nil) un petit carnivore de la famille de la mangouste, nommé ichneumon et surnommé "rat de pharaon". Il était vénéré par les Egyptiens car, comme les chats, il tuait les serpents et les souris. On a retrouvé de nombreuses momies d'ichneumon dans les tombeaux... alors peut-être est-ce pas un esprit d'assimilation que des momies de souris ont été placées dans le tombeau en question ?
Bien sûr il s'agit là de simples hypothèses de ma part... Et vous, quelles sont les vôtres ?
souris dans Asterix et Cléopatre |
On a retrouvé, dans un tombeau, des souris momifiées, aux côtés notamment de faucon.
Pourquoi avoir placé des souris embaumés dans un tombeau ? La finalité reste un peu incertaine... On momifiait en principe les animaux de compagnie du défunt, ou bien on plaçait dans sa tombe des objets qui lui seraient utiles dans l'au-delà.
La famille enterrée là pratiquait-elle l'élevage de souris (!) ?
Ou ces souris étaient-elles destinées à nourrir les faucons embaumées à leur côté ?
Elles étaient peut-être aussi vues comme des animaux psychopompes, destinés à porter l'âme des défunts vers l'au-delà...
Les souris du Louvre, |
Etant donné que, dans ce tombeau, on a retrouvé le corps d'un enfant de 12 ans, peut-être ces souris devaient-elles lui permettre de se prémunir contre des problèmes de salivations dans le royaume des morts ?
Enfin, on trouvait en Egypte (et toujours aujourd'hui dans le delta du Nil) un petit carnivore de la famille de la mangouste, nommé ichneumon et surnommé "rat de pharaon". Il était vénéré par les Egyptiens car, comme les chats, il tuait les serpents et les souris. On a retrouvé de nombreuses momies d'ichneumon dans les tombeaux... alors peut-être est-ce pas un esprit d'assimilation que des momies de souris ont été placées dans le tombeau en question ?
statuette d'ichneumon conservé au Walters Art Museum |
Bien sûr il s'agit là de simples hypothèses de ma part... Et vous, quelles sont les vôtres ?
jeudi 23 juillet 2020
Commensalité et sédentarisation
On parle, à propos des relations qu'entretiennent humains, rats et souris de rapports commensaux (du latin cum "avec" + mensa "table = ensemble à table). En effet, les trottes-menus se nourrissent des restes humains, souvent à l'insu de ces derniers. C'est pour ça que les souris sont présentes partout (c'est-à-dire partout où il y a des populations humaines). Elles sont attirées par ses maisons et ses gardes-mangers et, petite, elle peut se glisser partout. L'Homme voyage ? Il colonise de nouvelles terres et prend le bateau pour aller voir plus loin ? La souris le suit et va jusqu'à s'embarquer en passager clandestin !
Ce rapport de commensalité à permis aux chercheurs de comprendre que l'Homme s'est sédentarisé il y a 15 000 ans. En effet, ils ont remarqué qu'à cette époque là, dans la vallée du Jourdain (berceau de la sédentarisation), les populations de souris grises se sont concentrées en de mêmes endroits et ont connu une forte croissance, tandis que les populations de rongeurs des champs restaient stables. Durant des périodes de sécheresse ou de pénurie, la population de souris se stabilisait...
Ce serait là la preuve que les humains, ayant construit des habitations durables et des gardes-mangers, auraient commencé à se sédentariser et fournis, par-là, un hôtel-restaurant de choix pour les souris, d'où leur expansion. Lors des pénuries, quand les humains repartaient chercher de meilleurs terres ailleurs, les souris suivaient ou bien perdaient le gîte et le couvert, ce qui explique la stabilisation de leurs effectifs (sans Homme pour vous nourrir, ce n'est pas la fête tous les jours !).
Par ailleurs, la domestication du chat débute au Néolithique (8 500 ans avant J.C), d'un besoin de régulariser les populations de rongeurs.
Pour en savoir plus, vous pouvez lire cet article.
Ce rapport de commensalité à permis aux chercheurs de comprendre que l'Homme s'est sédentarisé il y a 15 000 ans. En effet, ils ont remarqué qu'à cette époque là, dans la vallée du Jourdain (berceau de la sédentarisation), les populations de souris grises se sont concentrées en de mêmes endroits et ont connu une forte croissance, tandis que les populations de rongeurs des champs restaient stables. Durant des périodes de sécheresse ou de pénurie, la population de souris se stabilisait...
Ce serait là la preuve que les humains, ayant construit des habitations durables et des gardes-mangers, auraient commencé à se sédentariser et fournis, par-là, un hôtel-restaurant de choix pour les souris, d'où leur expansion. Lors des pénuries, quand les humains repartaient chercher de meilleurs terres ailleurs, les souris suivaient ou bien perdaient le gîte et le couvert, ce qui explique la stabilisation de leurs effectifs (sans Homme pour vous nourrir, ce n'est pas la fête tous les jours !).
source |
Par ailleurs, la domestication du chat débute au Néolithique (8 500 ans avant J.C), d'un besoin de régulariser les populations de rongeurs.
Pour en savoir plus, vous pouvez lire cet article.
mercredi 22 juillet 2020
Trotte-menus pas si menus !
Nous avons parlé pendant un bon moment des rapports entre trotte-menus et chats, éternels ennemis ou improbables amis. J'aurais encore, probablement, l'occasion de vous poster plusieurs articles à ce sujet, mais à présent nous allons évoquer les rapports entre trottes-menus et humains, en nous penchant un peu sur leur Histoire.
A la Préhistoire, on trouvait déjà des rongeurs. Le plus gros d'entre eux, Josephoartigasia monesi,vivait il y a 4 à 2 millions d'années, aurait mesuré 3mètres et pesé une tonne... Ce qui est énorme par rapport à nos petits souris de quelques centimètres (en comptant la queue) et de quelques grammes. Il ressemblait un peu à un cochon d'Inde, mais de la taille d'un hippopotame.
Cela dit, le plus ancien fossile de la famille des murinées date du Miocène, soit il y a 14 millions d'années. Comme quoi les souris ne sont pas nées de la dernière pluie !
Originaire d'Asie (probablement d'Inde), la souris grise (espèce la plus commune en France) se serait répandu sur le pourtour méditerranéen 13 000 ans avant J.C, avant de coloniser toute l'Europe 10 000 ans av. J.C.
Le rat serait venu plus tardivement. Le rat noir, lui aussi originaire d'Asie, il serait arrivé en France au Moyen Âge, vers le VIIIème siècle et se serait vraiment implanté à partir du XIIème siècle. Aujourd'hui, le rat noir a quasiment disparu, décimé par son cousin le rat brun, qui a commencé à pointer son museau au XIVème siècle avant de se répandre en masse au XVIIIème siècle (soit très tardivement par rapport à la souris !).
Rats et souris sont présents partout sur la planète, Antarctique exceptée.
A la Préhistoire, on trouvait déjà des rongeurs. Le plus gros d'entre eux, Josephoartigasia monesi,vivait il y a 4 à 2 millions d'années, aurait mesuré 3mètres et pesé une tonne... Ce qui est énorme par rapport à nos petits souris de quelques centimètres (en comptant la queue) et de quelques grammes. Il ressemblait un peu à un cochon d'Inde, mais de la taille d'un hippopotame.
source |
Cela dit, le plus ancien fossile de la famille des murinées date du Miocène, soit il y a 14 millions d'années. Comme quoi les souris ne sont pas nées de la dernière pluie !
source |
Originaire d'Asie (probablement d'Inde), la souris grise (espèce la plus commune en France) se serait répandu sur le pourtour méditerranéen 13 000 ans avant J.C, avant de coloniser toute l'Europe 10 000 ans av. J.C.
Le rat serait venu plus tardivement. Le rat noir, lui aussi originaire d'Asie, il serait arrivé en France au Moyen Âge, vers le VIIIème siècle et se serait vraiment implanté à partir du XIIème siècle. Aujourd'hui, le rat noir a quasiment disparu, décimé par son cousin le rat brun, qui a commencé à pointer son museau au XIVème siècle avant de se répandre en masse au XVIIIème siècle (soit très tardivement par rapport à la souris !).
Rats et souris sont présents partout sur la planète, Antarctique exceptée.
Fossile de souris datant du Miocène (source) |
mardi 21 juillet 2020
Conseil tenu par des rats
Encore une fable de La Fontaine, à propos de rats et de chat... Ou pourquoi, aujourd'hui encore, rares sont les chats qui portent des grelots et qui ne chassent pas les souris !
La Fontaine, qui a écrit au 17e siècle, s'inspire pour cette fable d'une longue tradition. J'ai essayé de vous retrouver le texte de ses prédecesseurs. L'histoire reste la même, mais si le cœur vous en dit, vous pouvez les lire pour apprécier les variations opérées par différents auteurs sur un même thème.
L'article est un peu long, mais vous n'êtes pas obligés de tout lire.
Qui se lance pour la prochaine réécriture ?
Esope (6ème siècle avant J.C)
Les souris se réunirent toutes un jour en conseil et examinèrent les meilleurs moyens de se mettre
à l'abri des attaques du chat. On avait déjà discuté plusieurs propositions quand l'une des souris, personne d'importance et d'expérience, se leva et dit : "Je crois avoir trouvé un plan qui, si vous l'approuvez et le menez à bien, assurerait notre sécurité pour l'avenir. Voici : il nous faut attacher au cou de notre ennemi le chat un grelot dont le tintement nous avertira de son approche." Cette proposition fut chaudement applaudie ; et l'on avait déjà décidé de l'adopter, quand une vieille souris, se dressant sur ses pattes, dit : "Je conviens avec vous toutes que ce plan est quelque chose d'admirable; mais, puis-je vous demander qui va aller attacher le grelot ?
Kalila et Dimna (collection de contes et apologues orientaux, originaires du 3ème siècle avant J.C)
Marie de France (12e siècle)
Je n'ai trouvé le texte qu'en Ancien Français, je vous ai dont mis en regard une traduction moderne (approximative, car je ne suis pas une experte).
Eustache Deschamps (14ème siècle)
Sous forme de ballade (poème chanté)
J’apprends qu’entre les souris
Il y eut une discussion incroyable
Au sujet des chats, leurs ennemis,
Pour savoir comment
Elles pourraient vivre en sécurité
Et n’être plus apeurées.
L’une d’elles dit alors, pour résoudre ce problème :
Qui pendra la sonnette au chat ?
Cet avis fut accepté et partagé ;
Elles se séparent ainsi, toutes d’accord.
Une souris du plat pays
Les rencontre et demande
Ce qui a été décidé. Elles répondent alors
Que leurs ennemis seront défaits :
Ils auront une sonnette pendant au cou.
Qui pendra la sonnette au chat ?
« Ce ne sera pas mince affaire », dit un rat gris.
Elle demande avec sagesse
Qui accomplira cet exploit.
Alors chacune s’en va avec une bonne excuse.
Il n’y a aucun volontaire,
Leur besogne tombe donc à plat.
On parla bien, mais, au demeurant :
Qui pendra la sonnette au chat ?
ENVOI
Prince, on vous conseille bien souvent,
Mais on peut dire, à la suite du rat,
À propos du conseil qui n’aboutit à rien :
Qui pendra la sonnette au chat ?
Abstémius (15e siècle)
Bensérade (17e siècle)
Le chat étant des rats l'adversaire implacable,
Pour s'en donner de garde un d'entre eux proposa
De lui mettre un grelot au cou ; nul ne l'osa.
De quoi sert un conseil qui n'est point praticable ?
Un Chat, nommé Rodilardus
Faisait des Rats telle déconfiture
Que l’on n’en voyait presque plus,
Tant il en avait mis dedans la sépulture.
Le peu qu’il en restait, n’osant quitter son trou,
Ne trouvait à manger que le quart de son sou,
Et Rodilard passait, chez la gent misérable,
Non pour un Chat, mais pour un Diable.
Or un jour qu’au haut et au loin
Le galant alla chercher femme,
Pendant tout le sabbat qu’il fit avec sa Dame,
Le demeurant des Rats tint chapitre en un coin
Sur la nécessité présente.
Dès l’abord, leur Doyen, personne fort prudente,
Opina qu’il fallait, et plus tôt que plus tard,
Attacher un grelot au cou de Rodilard ;
Qu’ainsi, quand il irait en guerre,
De sa marche avertis, ils s’enfuiraient en terre ;
Qu’il n’y savait que ce moyen.
Chacun fut de l’avis de Monsieur le Doyen,
Chose ne leur parut à tous plus salutaire.
La difficulté fut d’attacher le grelot.
L’un dit : « Je n’y vas point, je ne suis pas si sot »;
L’autre : « Je ne saurais. »Si bien que sans rien faire
On se quitta. J’ai maints Chapitres vus,
Qui pour néant se sont ainsi tenus ;
Chapitres, non de Rats, mais Chapitres de Moines,
Voire chapitres de Chanoines.
Ne faut-il que délibérer,
La Cour en Conseillers foisonne ;
Est-il besoin d’exécuter,
L’on ne rencontre plus personne.
La Fontaine, qui a écrit au 17e siècle, s'inspire pour cette fable d'une longue tradition. J'ai essayé de vous retrouver le texte de ses prédecesseurs. L'histoire reste la même, mais si le cœur vous en dit, vous pouvez les lire pour apprécier les variations opérées par différents auteurs sur un même thème.
L'article est un peu long, mais vous n'êtes pas obligés de tout lire.
Qui se lance pour la prochaine réécriture ?
John Edwin Noble |
Esope (6ème siècle avant J.C)
Les souris se réunirent toutes un jour en conseil et examinèrent les meilleurs moyens de se mettre
à l'abri des attaques du chat. On avait déjà discuté plusieurs propositions quand l'une des souris, personne d'importance et d'expérience, se leva et dit : "Je crois avoir trouvé un plan qui, si vous l'approuvez et le menez à bien, assurerait notre sécurité pour l'avenir. Voici : il nous faut attacher au cou de notre ennemi le chat un grelot dont le tintement nous avertira de son approche." Cette proposition fut chaudement applaudie ; et l'on avait déjà décidé de l'adopter, quand une vieille souris, se dressant sur ses pattes, dit : "Je conviens avec vous toutes que ce plan est quelque chose d'admirable; mais, puis-je vous demander qui va aller attacher le grelot ?
Kalila et Dimna (collection de contes et apologues orientaux, originaires du 3ème siècle avant J.C)
Marie de France (12e siècle)
Je n'ai trouvé le texte qu'en Ancien Français, je vous ai dont mis en regard une traduction moderne (approximative, car je ne suis pas une experte).
Les souris firent parlement Ou il ot grant grumellemeni : La ou dut venir souri- mainte. Du chat fu faite la complainte : Le chat ne nous cesse rungier, Dieu le puist en enfer plungier ; Il manjue nos enfançons ; De li nuire nous avançons. — Un conseil vous donré, dit l'une , A mon dit s'acordoit chascune ; L'en liera une campenelle A son col, qui si nous revelle, Ainsi pourrons nous contraitier Quant il nous voudra agaitier, Quar nous orrons tantost le son. A chascun pleist ceste leççon. Or s'en retournent faisant feste, Chascune d'aler estoit preste. A tant es vous une vies souris Qui estoit tous alangouris; Elle estoit et vielle et boiteuse, De demander fu curieuse Ce qui estoit fait au concile, Ou avoient esté deus mile. L'en li dit de fil en aguille Vesci Calabre, veés ci Puille, Oncques délibération N'ot mes si grant discrétion. La vielle dit: Qui la livra? Et qui au chat tout droit ira ? Qui menra ceci a effet? Tout ne vaut rien se il n'est fet. » La moralité : Riens ne vaudroit faire les drois, Se n'estoit puissans et adrois Qui les feit garder et tenir. | Les souris firent parlement Où il y eut de grands grommellements Là où dut venir maintes souris. Du chat fut faite la plainte : « Le chat ne cesse de nous ronger, Que Dieu en Enfer le plonge ! Il mange nos petits enfants, Nous avançons qu'il faut lui nuire. — Un conseil, je vous donnerai, dit l'une, Qu'à mes paroles s'accorde chacune : On liera une clochette À son cou, ainsi si elle nous réveille, Nous pourrons résister, Quand il voudra nous guetter Car nous aurons aussitôt le son. » À chacun plaît cette leçon. Maintenant, de retourner faire la fête, Chacune était prête. Jusqu'à ce que vienne une vieille souris, Qui était toute languissante : Elle était vieille et boiteuse, De demander, elle fut curieuse, Ce qui avait été fait au conseil Où on avait été deux milles. On lui dit, de fil en aiguille, Voici Calabre, voilà Pouille {traduction difficile : expression faisant référence à deux régions italiennes, mais qui pourrait aussi signifier Voici couleuvre (sorte de catapulte), voici registre} Qu'à une telle délibération On ne mit jamais si grande discrétion. La vieille dit : « Qui la livrera ? Et qui au chat tout droit ira? Qui mènera ce projet à bien ? Tout ne vaut rien s'il n'est fait. » Il ne sert à rien de faire des lois, S'il n'y a personne de puissant et d'adroit Qui les fait respecter et appliquer. |
source |
Eustache Deschamps (14ème siècle)
Sous forme de ballade (poème chanté)
J’apprends qu’entre les souris
Il y eut une discussion incroyable
Au sujet des chats, leurs ennemis,
Pour savoir comment
Elles pourraient vivre en sécurité
Et n’être plus apeurées.
L’une d’elles dit alors, pour résoudre ce problème :
Qui pendra la sonnette au chat ?
Cet avis fut accepté et partagé ;
Elles se séparent ainsi, toutes d’accord.
Une souris du plat pays
Les rencontre et demande
Ce qui a été décidé. Elles répondent alors
Que leurs ennemis seront défaits :
Ils auront une sonnette pendant au cou.
Qui pendra la sonnette au chat ?
« Ce ne sera pas mince affaire », dit un rat gris.
Elle demande avec sagesse
Qui accomplira cet exploit.
Alors chacune s’en va avec une bonne excuse.
Il n’y a aucun volontaire,
Leur besogne tombe donc à plat.
On parla bien, mais, au demeurant :
Qui pendra la sonnette au chat ?
ENVOI
Prince, on vous conseille bien souvent,
Mais on peut dire, à la suite du rat,
À propos du conseil qui n’aboutit à rien :
Qui pendra la sonnette au chat ?
Abstémius (15e siècle)
Bensérade (17e siècle)
Le chat étant des rats l'adversaire implacable,
Pour s'en donner de garde un d'entre eux proposa
De lui mettre un grelot au cou ; nul ne l'osa.
De quoi sert un conseil qui n'est point praticable ?
source |
lundi 20 juillet 2020
Les Souris de Sansonnet
Le thème du chat et de la souris, et leur improbable amitié, a vraiment inspiré de nombreux auteurs !
Voilà encore un petit roman qui traite de ce sujet : Les Souris de Sansonnet, de Dick-King Smith.
Sansonnet est un chat de ferme pas comme les autres.
Déjà, il porte un nom d'oiseau (ce qui, avouez-le, est peu commun pour un chat !)
Ensuite, il aimer les souris. Il les aime, non pas comme casse-croûte, mais comme animal de compagnie !
En effet, quand il voit que la fille du fermier a trois lapins pour animaux domestiques, il décide d'avoir, lui aussi, ses propres animaux de compagnie. Il va donc élever des souris au fond d'une vieille baignoire relégué dans une grange. Mais la chose n'est pas facile car ses souris sont turbulentes, ont beaucoup d'exigences et, surtout... elles risquent de se faire manger car Sansonnet n'est pas le seul chat de la ferme !
Voilà encore un petit roman qui traite de ce sujet : Les Souris de Sansonnet, de Dick-King Smith.
Sansonnet est un chat de ferme pas comme les autres.
Déjà, il porte un nom d'oiseau (ce qui, avouez-le, est peu commun pour un chat !)
Ensuite, il aimer les souris. Il les aime, non pas comme casse-croûte, mais comme animal de compagnie !
En effet, quand il voit que la fille du fermier a trois lapins pour animaux domestiques, il décide d'avoir, lui aussi, ses propres animaux de compagnie. Il va donc élever des souris au fond d'une vieille baignoire relégué dans une grange. Mais la chose n'est pas facile car ses souris sont turbulentes, ont beaucoup d'exigences et, surtout... elles risquent de se faire manger car Sansonnet n'est pas le seul chat de la ferme !
dimanche 19 juillet 2020
Heurterat et la souris fantôme
Heurterat le chat aimait bien les rats
Il les aimait tendre, il les aimait gras
Chantez : hé-crac, déri-crac, aimait bien ses rats.
Heurterat, savez-vous, s'en allait chasser
A la neige l'Hiver, au Soleil l'Eté,
Chantez : hé-crac, déri-crac, s'en allait chasser.
Un jour il épia près de la rivière
Un Couineur dodu fierté de sa mère.
Chantez : hé-crac, déri-crac, près de la rivière.
Sur le rat sauta, d'un bond et d'un coup,
Pour manger la bête au fond de son trou
Chantez : hé-crac, déri-crac, d'un bon et d'un coup.
Mais entre ses griffes nul rat il ne vit,
Resta bouche-bée et l'oeil en furie.
Chantez : hé-crac, déri-crac, nul rat il ne vit.
Entendit couiner et un rat parla
Qu'il ne put trouver si bien qu'il cherchât.
Chantez : hé-crac, déri-crac, et un rat parla.
"Cher chat, dit la voix, je suis rat-esprit,
Je te hanterai jusqu'au dernier cri !"
Chantez : hé-crac, déri-crac, je suis rat-esprit.
La voix de l'esprit lui tourna la tête,
Il sauta en l'air et prit l'escampette.
Chantez : hé-crac, déri-crac, poudre d'escampette.
Finis les mulots pour le pauvre chat,
Il ronge à présent blattes et cancrelats
Ou quelque vampire aveugle au vol bas,
Mais n'a plus de goût pour souris et rat !
Chantez : hé-crac, déri-crac,
Miaou-ouaou, déri-crec,
Hé-crac, déri-cra mange plus de rat !
(Cette chanson est extraite du roman de Tad Williams La Légende du noble chat Piste-Fouet)
source |
samedi 18 juillet 2020
Le Chat qui ne mangeait pas de souris
Aujourd'hui, je vous propose d'écouter la présentation du Chat qui ne mangeait pas de souris de Carmen Agra Deedy. Encore un roman qui met en scène des chats et des souris qui entretiennent des rapports amicaux, à l'époque de l'Angleterre victorienne.
vendredi 17 juillet 2020
A vieux chat, jeune souris
Il y a encore un proverbe dont je ne vous ai pas parlé (délibérément), l'autre jour : A vieux chat, jeune souris.
Si je lui consacre un article entier, c'est parce qu'à mon avis il nécessite une explication. Parce qu'enfin, quel peut bien être le rapport entre la vieillesse d'un chat la jeunesse d'une souris ?
En réalité, pour comprendre cette maxime, il faut connaître la fable de La Fontaine dont elle est tirée :
* Ramina (= ruminer) + Grobis (= gros matou)
A vieux chat, jeune souris signifie donc que la jeunesse se croit plus maligne, mais en réalité elle n'est que candeur : la vieillesse sait qu'il ne faut pas "procrastiner" (qu'il vaut mieux manger aujourd'hui plutôt que d'attendre demain !)
La Fontaine aurait tiré le sujet de cette fable d'un apologue écrit par Abstémius, fabuliste italien du XVème siècle. En revanche, la fable d'Abstémius ne mettait pas en scène un chat et une souris, mais un renard et une poule (elle aurait donc été parfaite pour l'Eté dernier !).
Si je lui consacre un article entier, c'est parce qu'à mon avis il nécessite une explication. Parce qu'enfin, quel peut bien être le rapport entre la vieillesse d'un chat la jeunesse d'une souris ?
En réalité, pour comprendre cette maxime, il faut connaître la fable de La Fontaine dont elle est tirée :
gravure de J.J Grandville |
Le vieux Chat et la jeune Souris
Une jeune Souris de peu d’expérience,
Crut fléchir un vieux Chat implorant sa clémence,
Et payant de raisons le Raminagrobis*.
Laissez-moi vivre ; une Souris
De ma taille et de ma dépense
Est-elle à charge en ce logis ?
Affamerais-je, à votre avis,
L’Hôte et l’Hôtesse, et tout leur monde ?
D’un grain de blé je me nourris ;
Une noix me rend toute ronde.
À présent je suis maigre ; attendez quelque-temps.
Réservez ce repas à messieurs vos Enfants.
Ainsi parlait au Chat la Souris attrapée.
L’autre lui dit : Tu t’es trompée.
Est-ce à moi que l’on tient de semblables discours ?
Tu gagnerais autant de parler à des sourds.
Chat et vieux pardonner ? cela n’arrive guère.
Selon ces lois descends là-bas,
Meurs, et va-t’en tout de ce pas
Haranguer les sœurs Filandières.
Mes Enfants trouveront assez d’autres repas.
Il tint parole ; et pour ma Fable
Voici le sens moral qui peut y convenir.
La jeunesse se flatte, et croit tout obtenir.
La vieillesse est impitoyable.
* Ramina (= ruminer) + Grobis (= gros matou)
source |
A vieux chat, jeune souris signifie donc que la jeunesse se croit plus maligne, mais en réalité elle n'est que candeur : la vieillesse sait qu'il ne faut pas "procrastiner" (qu'il vaut mieux manger aujourd'hui plutôt que d'attendre demain !)
La Fontaine aurait tiré le sujet de cette fable d'un apologue écrit par Abstémius, fabuliste italien du XVème siècle. En revanche, la fable d'Abstémius ne mettait pas en scène un chat et une souris, mais un renard et une poule (elle aurait donc été parfaite pour l'Eté dernier !).
jeudi 16 juillet 2020
Chat et souris associés
Un conte de Grimm, Chat et souris associés, met également en scène une alliance entre ces deux animaux. Mais l'histoire tourne moins bien que dans le roman de Luis Sepulveda !
Un chat et une souris décident de vivre ensemble, dans la même maison, et de partager les dépenses en vrais colocataires. Un jour le chat, prévoyant, rappelle qu'il faut faire des réserves pour l'Hiver, afin de ne pas avoir faim quand il fera froid. Ils vont donc acheter un pot de saindoux. Pour que personne ne leur vole leur bien, ils vont le cacher dans une église, sous l'autel là où nul n'oserait commettre un larcin.
Les jours passent et le pot de saindoux trotte dans l'esprit du chat... Un jour, n'y tenant plus, il prétend à la souris qu'il doit se rendre au baptême d'un chaton, qu'on lui a donné pour filleul. En réalité, il file à l'église et lèche tout le dessus du pot de saindoux. Quand il revient, il raconte à la souris que le chaton a été nommé Sanledessus.
Il a recours deux autres fois à cette ruse, mangeant la moitié du saindoux (et hâblant que le chaton s'appelle Miparti), puis la totalité (pour un chaton baptisé Toufini). La souris ne manque pas de trouver ces noms étranges, mais elle ne cherche pas plus loin.
L'Hiver arrive et la faim avec. La souris propose au chat d'aller chercher le pot de saindoux dans l'église. Arrivée devant l'autel, elle constate la disparition de leur bien et comprend toutes les manigances du chat. Elle commence à le houspiller, mais avant même qu'elle ait pu finir sa phrase, le chat lui bondit dessus et la dévore !
Comme qui, mieux vaut réfléchir à deux fois avant de se mettre en colocation (surtout si on est une souris !)
Vous pouvez lire le texte intégral en cliquant ici.
Personnellement, j'aime beaucoup cette description que le chat fait de la souris : "avec ta vilaine robe gris foncé à longue natte".
source |
Un chat et une souris décident de vivre ensemble, dans la même maison, et de partager les dépenses en vrais colocataires. Un jour le chat, prévoyant, rappelle qu'il faut faire des réserves pour l'Hiver, afin de ne pas avoir faim quand il fera froid. Ils vont donc acheter un pot de saindoux. Pour que personne ne leur vole leur bien, ils vont le cacher dans une église, sous l'autel là où nul n'oserait commettre un larcin.
Les jours passent et le pot de saindoux trotte dans l'esprit du chat... Un jour, n'y tenant plus, il prétend à la souris qu'il doit se rendre au baptême d'un chaton, qu'on lui a donné pour filleul. En réalité, il file à l'église et lèche tout le dessus du pot de saindoux. Quand il revient, il raconte à la souris que le chaton a été nommé Sanledessus.
Il a recours deux autres fois à cette ruse, mangeant la moitié du saindoux (et hâblant que le chaton s'appelle Miparti), puis la totalité (pour un chaton baptisé Toufini). La souris ne manque pas de trouver ces noms étranges, mais elle ne cherche pas plus loin.
L'Hiver arrive et la faim avec. La souris propose au chat d'aller chercher le pot de saindoux dans l'église. Arrivée devant l'autel, elle constate la disparition de leur bien et comprend toutes les manigances du chat. Elle commence à le houspiller, mais avant même qu'elle ait pu finir sa phrase, le chat lui bondit dessus et la dévore !
source |
Comme qui, mieux vaut réfléchir à deux fois avant de se mettre en colocation (surtout si on est une souris !)
illustration de Wlater Crane |
Vous pouvez lire le texte intégral en cliquant ici.
Personnellement, j'aime beaucoup cette description que le chat fait de la souris : "avec ta vilaine robe gris foncé à longue natte".
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